Egypte

La vallée des Rois, des Reines, des Nobles !

« C’étaient des hommes géants sur des chevaux colosses. » Victor Hugo évoquait ainsi la Garde Impériale à Waterloo mais son texte s’applique à merveille à une autre partie du monde qu’il a envahie, certes, mais qu’il a aussi participé à faire mieux connaître : l’Egypte, ses pyramides, ses pharaons, ses rois et ses divinités.

Qui étaient ces autres hommes surgis d’un si lointain passé, possédés d’exaltation et d’espérance ? Ils étaient quatre, motivés bien sûr par un instinct de conquête mais qui, hallucinés, n’aspiraient qu’à une seule fin : vaincre la mort et s’inscrire à jamais dans l’immortalité.

Ils se nommaient Djezer, Snefrou, Khoufou et Kephren. Sous leur volonté farouche et désespérée, jamais autant de fureur et de vaillance ne furent déployées.

Quarante siècles plus tard, leur éblouissante tentative nous bouleverse encore. Ce sont les Pyramides. Ecoutons ensemble, en Egypte, ce grand cri de désespérance et d’espoir qui souffle du désert, l’immense clameur de ces quatre hommes qui ont refusé de disparaître à jamais.             

Voilà près d’un demi siècle, je m’étais lié d’amitié avec l’un des guides de Deir-el-Bahari, Nubi-Hassan, qui me laissait l’usage de mon flash. Hélas, le résultat s’avéra très mauvais. En revanche, il avait confectionné un disque de tiges de papyrus recouvert de papier métallisé plus ou moins froissé, récupéré sur les emballages de tablettes de chocolat abandonnées par les touristes. Il captait la lumière du soleil à l’aide de ce dispositif, qu’il dirigeait vers l’entrée de certains tombeaux, à l’intérieur desquels se tenait un collègue muni du même miroir primitif, dont il orientait la lumière répercutée sur des fresques accessibles.

Et Raoul, ganté de cuir, les mains moites par 40 degrés à l’ombre mais sans ombre, n’avait plus qu’à prendre le cliché choisi à l’aide de son Leica monté sur pied.

Si les photos prises au flash sont brûlées, les autres, cernées d’une ombre qui en accentue encore le mystère, révèlent une fraîcheur et une beauté à en pleurer.

Certaines m’ont réellement plongé dans une extase bouleversée. A l’époque, je n’avais pas hésité, à la grande satisfaction de Nubi-Hassan, à m’allonger dans le sarcophage, vide, du pharaon Sethi premier. La paroi interne du sarcophage en porphyre était sculptée d’un bas-relief de la déesse Isis qui me prenait dans ses bras pour me conduire dans l’Au-Delà.

Au-dessus de moi, un texte gravé proclamait :

Le Roi n’est pas mort, il est devenu un être qui comme le soleil du matin s’élève à l’est, derrière l’horizon, il se repose de la vie à l’ouest, comme le soleil à son coucher, mais l’aube le retrouvera à l’est.

Avez-vous dit qu’il mourra ? Non, il ne meurt point. Il est le Soleil, il vit éternellement.

O sublime, parmi les étoiles impérissables, tu ne périras pas. Les Hommes tombent et leurs noms disparaissent mais Rê prend ce Roi par la main et le conduit vers le ciel afin qu’il ne meure pas sur la Terre parmi le Hommes.

Ce Roi s’enfuit loin de vous, ô mortels. Il n’est plus de la Terre mais du ciel. Comme un nuage, il s’envole vers le ciel, il s’élève au ciel comme un épervier et ses plumes sont pareilles à celles de l’oie sauvage. Il s’élance vers le ciel comme une cigogne, il baise le ciel comme un faucon, il saute vers le ciel comme une sauterelle. Il monte vers le ciel, il monte vers le ciel sur le vent, sur le vent.

Les nuages du ciel se sont chargés de Lui, Il monte sur un nuage de pluie. Il est une flamme qui s’élève sur les ailes du vent, vers les confins du firmament. Les escaliers du ciel s’abaissent devant Lui afin qu’il puisse monter.

O Dieux, soutenez le Roi de vos bras ! Elevez-le, hissez-le vers le ciel, vers le ciel, vers le ciel, vers le grand trône de Rê au milieu des Dieux.

Les doubles portes du ciel s’ouvrent, les doubles portes du ciel s’écartent. O Rê, ton fils est venu à toi. Presse-le sur ton coeur, serre-le dans tes bras ! O Roi, ô très pur, prends ta place dans la barque du Soleil et vogue à travers le ciel ! Vogue avec les étoiles impérissables, vogue avec les astres qui ne se lassent jamais !

Que de souvenirs !

Nous sommes restés quinze jours à l’hôtel Winter de Louxor, pratiquement vide de touristes car, en ce temps-là, Israël menaçait de bombarder la vallée du Nil.

Ensuite, ce furent Denderah, Edfou et son gigantesque temple d’Haroéris (Horus de l’horizon), Ezna, Kôm-Ombo consacré à Sobek, le dieu Crocodile suivi de son fils Panebtaoui, Assouan où, dans le désert, sur le chemin de l’abbaye de Saint-Siméon, Martine, qui s’était éloignée parmi les cérastes cornues pour satisfaire un besoin pressant, tomba sur une momie dont les pieds enveloppée de bandelettes sortaient du sable du désert.

Le temple d’Isis, près de l’île Eléphantine. « On ne visite pas, les temples sont plongés sous les eaux du Nil. » Qu’à cela ne tienne, et d’un crawl insolent et irrésistible, je partis sur le champ les visiter à la nage…

Abou-Simbel enfin, en un désert d’apothéose !

Voir les galeries photos consacrées à l’Egypte…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *