Le Nil et Assouan

Tel qui instruit ceux qui ne savent pas est comme un Vivant parmi les Morts. Si un jour passe sans que j’aie appris quelque chose qui me rapproche de Dieu, que l’aube de ce jour ne soit pas bénie. (Verset des Hadices)

En l’an 3400 avant Jésus-Christ, le 17 juin fut une date importante car c’est en ce jour que, pour la première fois après sa disparition annuelle, on observa avant l’aube Sirius, l’étoile-chien au-dessus de l’horizon oriental. Dans la si voluptueuse douceur d’une aurore féerique, l’ensorcelante aurore de l’Egypte immortelle, j’ai vu l’étoile du matin se lever sur le Nil.

Une animation fébrile règne aujourd’hui à Louxor, devant la grande porte de l’Old Winter Palace, et nombreux et affairés sont les guides nubiens aux grandes djellabas grises qui acheminent les bagages des clients de l’hôtel jusqu’au quai Sânkharé Mentouhotep où le Néferkari est à l’ancre.

Ce somptueux bateau de croisière va remonter le Nil jusqu’à Assouan et, dans l’incendie des soirs où le soleil descend, déployer à nos yeux éblouis ce grand linceul de pourpre où dorment les Dieux Morts.

Cette croisière, ce pèlerinage, va se révéler pour nous insolite et incomparable. Tout le monde ne communique pas avec les anciennes divinités. Il faut connaître le code et savourer ces moments comme une fabuleuse ivresse échappant à tout contrôle. C’est ainsi que, dans le reflux d’un infini ressac d’éternité, une momie de trois-mille ans viendra vers nous, à notre rencontre, du fond du désert libyque, émergeant des sables d’un ancien mastaba ruiné.

La surprenante facture de ses bandelettes en fibres d’aloès évoque un personnage important.

Un roi? Pourquoi pas car, dans cet immense cortège d’années, nous avons pu voir défiler 350 pharaons, dont quelques-uns ne sont que des ombres tout au plus dotées d’un nom. L’histoire de ce pays incomparable commence à un moment aussi éloigné de la fondation de Rome que cette dernière est éloignée de notre époque.

Aussi, en achevant sa nouvelle inhumation à l’aide d’outils de fortune, je ne manquai pas de le saluer ainsi: « Salut à toi, Roi Faucon, Roi Roseau, Roi Seth, Roi Frelon, Seigneur du Vautour et du Cobra. »

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